Il est devenu un outil indispensable pour suivre tout le football sans payer un rond. Il est à la fois Roumain, Russe, Arabe et avec un peu de bol Français. Il est un symbole de résistance face à l’oppression des droits télé. Lui, c’est le streaming.
« Quelqu’un a un bon lien » ? Les week-ends, les soirs de Ligue des Champion, bref, quand il y a du foot qui passe en crypté, ces quelques mots sont devenus communs. Tout le monde sur Twitter et ailleurs cherche à avoir la meilleure qualité possible, la cam’ supérieure, éventuellement en Français (même si avec Sport Dub c’est devenu optionnel), au pire en Anglais, et s’il n’y a rien on prend même du Roumain. Après de longues années de recherches, après avoir jonglé d’une qualité « très médiocre » à « MAIS PUTAIN ON VOIT MÊME PAS LE BALLON MERDE », après avoir trimé pour en arriver là, j’estime avoir dans mes favoris une liste conséquente de sites fiables. Encore heureux.
N’ayant jamais eu de télévision (hormis celles du bar d’à côté ou des voisins) pour suivre le football, le streaming est venu bousculer mon quotidien footballistique qui se résumait à une époque pas si lointaine à « Onze Mondial » (pour les posters, qui ont sans doute provoqué chez beaucoup le tiraillement de choisir une des deux faces à afficher dans sa chambre) et les multiplex d’Europe 1 (je ne compte pas le nombre de fois où j’ai cru que Saccomano allait clamser). Et oui, chez moi le streaming sert aussi à regarder la Coupe de France sur France2.fr et CJP sur TF1Live.
Mon rapport foot-télé est une histoire compliquée. J’ai assisté à la finale de 98 sur un écran qui hésitait entre la couleur et le noir et blanc, dans un bar perché dans les Alpes à 1200m d’altitude. Mes Champs-Elysées à moi. Après l’Euro 2000 chez la famille, la Coupe du Monde 2002 et son France-Sénégal un jour d’école est une sorte de jubilation personnelle, où tout le monde à la récré du midi se retrouve dans ma situation quotidienne. Le but de Diop, on est beaucoup à l’avoir vécu l’oreille tendue sur une radio branchée sur RMC. Aujourd’hui la situation a changé. Je n’ai toujours pas de télé, pourtant je ne rate plus un match qui m’intéresse. Le streaming m’a sauvé.
Radins ou résistants ?
Mais ne nous voilons pas la face, le streaming vient surtout permettre à des radins de ne pas dépenser un radis pour Canal ou BeIn et regarder tranquillou Ligain, Premier League ou Ligue des Champions. Il n’y a pas si longtemps, TF1 avait les droits de la L1 pour Téléfoot (vous mentez en niant que Kashmir des Led Zep’ n’éveille pas en vous un sentiment nostalgique) et la priorité sur la LDC (et la F1 mais c’est une autre histoire). Aujourd’hui, CJP n’a plus que Valbuena en Bleu quatre fois par ans pour se pignoler. Pour voir du foot en quantité (et qualité) et sans passer par le « CFC », en clair certes, mais plus passionné par les polémiques sur l’arbitrage et un but d’Ibrahimovic à toutes les sauces que par les résumés des matchs, il faut payer. Et payer cher. Deux abonnements sont nécessaires pour suivre dans son intégralité le football européen : non, merci. Internet, c’est un seul paiement mensuel, et en plus du foot on peut y faire plein d’autres trucs chouettes.
On y arrive finalement : le streaming ne serait-il pas, après tout, une sorte de symbole de l’alter-foot ? Le rejet des chaines que sont Canal ou BeIn, le refus de payer un peu plus à chaque fois en choisissant le streaming illégal peut être perçu comme étant un acte délibéré de protestation, une manière de dire « stop ». Certes, le foot n’est plus le sport populo qu’il était, et qu’il devrait être, cependant l’accumulation de fric à claquer pour le suivre dans sa quasi intégralité est devenue indécente. Le streaming est une alternative. « Allez vous faire voir, je paierai pas pour ce que vous me proposez » est un bon résumé.
Bref, que ça soit pour combler le manque de télévision, la pauvreté, ou pour exprimer un rejet du « tout-fric » actuel, le streaming est désormais ancré dans les pratiques des amateurs de foot (hormis ceux qui sont assez friqués pour se payer BeIn et Canal). La qualité s’améliore, et l’on est de moins en moins obligés à trouver un lien un peu moins pourrave que le précédent pour cause de « chaîne bannie ». Alors pour finir, j’aimerais remercier tous les anonymes qui jouent leur vie pour permettre à des gens comme moi de regarder les matchs, en diffusant illégalement. Continuez comme ça les mecs, vous êtes bons.